J'étais dans l'équipe de Hockey sur glace de mon lycée. Comme il n'y avait pas assez de filles volontaires pour former une équipe féminine je pratiquais mon sport dans l'équipe masculine. L'équipe de mon lycée était loin d'être la plus mauvaise du pays puisqu'elle a terminé en finale du tournoi des lycées du pays. Pour les joueurs des deux équipes c'est un match à hauts enjeux car c'est un peu comme dans les autres sports. Il y a des sélectionneurs qui viennent de tout le pays et des Etats-Unis pour attirer les meilleurs joueurs dans leur filets. Pour ma part, j'avais, comme bon nombre de mes coéquipiers, envoyé un dossier de candidature à la prestigieuse université sportive de Vancouver et cette année c'était justement Ryan McGregor le président de l'Université en question qui devait remettre la coupe aux vainqueurs. On savait tous qu'on avait une carte à jouer et honnêtement j'étais plutôt bien partie. Au premier tiers temps j'avais permis à mes coéquipiers de marquer par deux fois. Au second tiers temps, j'avais sauvé un palet des filets de notre gardien mais au delà de cela je n'avais pas été des plus brillante pendant cette période. Alors déterminée à me donner à fond pour le dernier tiers temps, j'étais parvenue à être bien positionnée pour marquer. Deux petits coups de crosse sur la glace en guise d'appel à Joey sous le maillot 32 et il me faisait la passe. Je me souviens avoir progressé vers le gardien et armé ma crosse pour le tir. Après c'est un peu plus obscur. Je ne sais de la scène que ce que l'on m'a raconté. Visiblement j'ai tiré et le palet a foncé droit dans le coin supérieur gauche de la cage, touchant l'armature métallique et rentrant dans le filet. Moi je n'ai vu que du noir. En effet deux défenseurs de l'équipe adverse s'étaient rués sur moi dans l'espoir de m'arrêter dans mon élan. Ils ont fait ce que l'on appelle dans le jargon une charge incorrecte et que nous dans l'équipe on nomme le hot dog. Prise entre deux gros mâles barraqués et qui devaient facilement faire une tête de plus que moi autant vous dire que je jouais là le rôle d'une bien maigre saucisse. On m'a dit que je m'étais effondrée sur le coup, que la visière de mon casque s'était en partie brisée. Bref j'étais KO. Après cela une bagarre a éclaté entre mes coéquipiers et les responsables de l'acte d'agression. Car on considère que c'est une agression du moment que le joueur chargé n'a plus le palet. Je reconnais bien là mes amis, ils avaient beau avoir eu du mal à m'accepter maintenant le premier qui me touchait était sûr d'être attaqué à son tour. C'est ça d'être la seule fille dans un groupe de mecs. Bref toujours est-il qu'à la stupéfaction quasi-générale on avait découvert que j'étais une fille et l'on m'avait rapidement évacué de la glace pour l'infirmerie. J'ai repris connaissance une dizaine de minutes plus tard, j'avais la sensation d'avoir un chou-fleur à la place du nez et mon genou me faisait mal. Le médecin qui s'occupait de moi m'avait sommairement expliqué la situation et m'avait dit que je devrais être transportée à l'hôpital pour faire des examens complémentaires car il estimait que c'était plus prudent. Et puis alors que je demandais le score j'ai vu cinq ou six de mes coéquipiers se ruer dans l'infirmerie fous de joie. On avait gagné la coupe. Sans demander leur reste ils m'avaient soulevé et embarqué sur la glace pour fêter la victoire avec le reste de l'équipe. Tenant à peine debout, James et Bradley me soutenaient de chaque côté pour me diriger.

Lors de la remise de la coupe le président de l'université venait à tour de rôle serrer la main des joueurs. Quand il s'était approché de moi il avait eu un étrange sourire.

"Si à l'occasion vous vouliez poursuivre dans le hockey universitaire, je serais ravi d'étudier votre dossier miss, ce n'est pas tous les jours que j'ai l'occasion d'auditionner une fille pour du hockey sur glace"
- J'ai rendez-vous demain monsieur" répondis-je un peu sonnée.

"Parfait dans ce cas. A demain !"

Il avait dit ceci à plusieurs autre de mes coéquipiers. Bon le lendemain je ne sais pas si j'avais vraiment brillé à l'oral de motivation. J'avais le genou dans une atèle, le nez violet et les anti-douleurs que j'avais pris avant de venir à l'entretien me faisaient un peu somnoler. Je ne sais pas s'ils se sont montrés indulgents ou si j'ai été vraiment plus convaincante que je ne m'y attendais mais deux semaines plus tard je recevais ma lettre de réponse. J'étais acceptée en première année.

Que dire que dire... Eh bien je suis née à Llangollen au Pays de Galles un peu en catastrophe à ce qu’on m’a raconté. Et un peu en avance aussi. Mes parents étaient en vacances au pays de Galles chez mes grands-parents paternels. Mon père devait participer à une rencontre de hockey sur glace opposant le Canada et l’Angleterre et quitte faire le voyage mes parents s’étaient dit qu’ils pourraient prolonger leur séjour sur l’île britannique. Le travail avait commencé pendant le second tiers temps du match. Ma mère avait été conduit à l'hôpital le plus proche tandis que ses parents étaient chargés de prévenir mon père. Mais en pleine rencontre et à l’heure où le téléphone portable n’était pas roi des communications il n’était pas toujours simple de se joindre. Finalement mon père a su que sa femme était entrée à l’hôpital. A peine le match terminé il fut le premier joueur hors de la patinoire. Il avait juste enfilé une paire de basket et emprunté la voiture d’un ami et filé pour le pays de Galles. La rencontre se déroulait à Liverpool et pour atteindre Llangollen il y avait un peu de trajet à faire malgré tout. C’est dégoulinant de sueur que mon père est arrivé à la maternité une dizaine de minutes avant que je ne vois le jour.

Bon après vous voulez savoir quoi d’autres ? Si j’étais une gentille fifille ? Pas vraiment le genre de la maison? J’étais relativement sage mais mes tendances de garçon manqué m’ont fait faire les quatre cent coups. Je n’y peux rien mon père est un champion de hockey sur glace et qu’il m’a transmis le virus. Et puis de toute manière je suis plus à l’aise avec le genre masculin. Comme je ne suis pas vraiment le genre de fille très girly (bien qu’à présent que je suis majeure j’ai fait énormément de progrès en la matière quand j’étais môme ce n’était pas gagné du tout) je n’ai pas collectionné les poupons ni les barbies mais plus les bleus et les bêtises. Grimper aux arbres en faisait partie par exemple.

Ensuite je peux vous dire que j’ai toujours fait du hockey sur glace aussi loin que je m’en souvienne. Je n’aime pas vraiment le café à moins qu’il ne soit coupé avec du lait, du chocolat ou encore du sucre. Je joue de la batterie depuis l’âge de 10 ans à peu près et j’étais dans un groupe jusqu’à ce que j’emménage à Vancouver pour commencer mes études à l’université.

Tiens cela me fait penser que si je vous ai dit où je suis née je ne vous ai pas dit où j’ai grandi. J’ai passé une partie de mon enfance à puis on a déménagé quand j’avais cinq ou six ans pour aller vivre aux Etats-Unis à Seattle. Mon père avait été engagé dans l’équipe de hockey de la ville pour deux ans et après il a signé à Chicago. Quand j’ai eu 13 ou 14 ans on est revenu vivre au Canada du côté de Winnipeg.

Je ne sais pas du tout quel métier je voudrais exercer si jamais par grand malheur ma carrière de hockeyeuse ne prenait pas le tournant que je voudrais. On m’a dit d’y réfléchir sérieusement mais après trois ans d’université du sport je n’en ai toujours pas la moindre idée. J’aime tellement ce que je fais que finalement je ne me vois pas faire autre chose.